Romain Schué Radio Canada 30 juin 2022
Héberger les demandeurs d’asile arrivant au Canada, et particulièrement par le chemin Roxham, au Québec, devient un véritable casse-tête pour les autorités fédérales et provinciales. Notamment face au nombre record de migrants qui franchissent, à pied, la frontière canado-américaine.
Entre janvier et mai, plus de 13 000 demandeurs d’asile ont traversé le chemin Roxham, en Montérégie. Jamais, avant le début de l’été, le Canada n’avait accueilli autant de personnes empruntant cette voie irrégulière pour entrer au pays.
Un pic a d’ailleurs été atteint le mois dernier, avec le passage de 3449 personnes. Selon nos informations, des données similaires sont à prévoir pour le mois de juin. Durant certaines journées, environ 200 personnes utilisent cette route pour arriver au Canada.
Québec et Ottawa s’attendent d'ailleurs à un été extrêmement chargé, à l’instar d’août 2017, lorsque les installations du stade olympique de Montréal avaient été réquisitionnées. Une telle option n'est cependant pas encore envisagée.
Des hôtels au maximum de leur capacité
Loger ces demandeurs d’asile, de plus en plus nombreux, s’avère être une mission complexe.
Responsable de l'hébergement temporaire de ces migrants, le Programme régional d'accueil et d'intégration des demandeurs d'asile (PRAIDA) a récemment rehaussé légèrement sa capacité d’accueil. En vain.
Nos 1200 lits sont présentement tous occupés, explique un porte-parole de ce programme financé par Québec. Ce dernier dispose de deux lieux d'hébergement : l’hôtel Hyatt (anciennement Place Dupuis) au centre-ville de Montréal, et un YMCA dans l’ouest de l’île.
Face à cette situation, le gouvernement fédéral avait réservé, dès le début de l’année, 885 chambres d’hôtel dans la grande région montréalaise. Celles-ci servent notamment à accueillir des demandeurs d’asile non vaccinés, pour y effectuer une quarantaine de 14 jours.
Ce nombre a lui aussi été revu à la hausse. Désormais, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) dispose de 1143 chambres, dont 83 % sont actuellement occupées.
Problème, cet hébergement à court terme se prolonge. De nombreux migrants, incapables de trouver un autre logement, restent dans ces hôtels et les places libres sont une rareté.
[Nous] explorons d’autres installations disponibles, assure une porte-parole d’IRCC.
Des séjours de plus en plus longs
La durée moyenne d’un séjour tourne autour de 14 à 18 jours dans l’un des hébergements du PRAIDA, explique ce dernier. Cependant, Radio-Canada a pu parler, au cours des dernières semaines, avec plusieurs demandeurs d’asile qui y vivent ou qui y sont restés parfois plus d’un mois. En réalité, les migrants sont invités à quitter les lieux dès qu’ils reçoivent leur premier chèque d’aide sociale. Durant le mois de juin, nous avons reçu en moyenne 50 personnes par jour, alors que la moyenne des départs de nos installations était de 43 personnes par jour, détaille le PRAIDA.
Des roulottes pour héberger les demandeurs d’asile
L’une des solutions mises en place par Ottawa, face à cet afflux de demandeurs d’asile, est d’agrandir sensiblement l’espace d’hébergement géré par l’Agence des services frontaliers (ASFC), situé directement à la frontière canado-américaine.
Depuis 2017 et l’arrivée d’une première vague de milliers de migrants, des dizaines de roulottes ont été installées au Centre de traitement régional (CTR), sur une voie de desserte, au bord de l’autoroute 15. De nouveaux espaces similaires verront le jour dans les prochaines semaines.
Actuellement la capacité d’accueil au CTR est de 297 personnes en même temps sur le site. Avec l’ajout des nouvelles structures, la capacité du site sera augmentée à 477, indique Maria Ladouceur, porte-parole de l’ASFC.
Après leur arrivée par le chemin Roxham, les demandeurs d’asile sont transférés à cet endroit où les agents de l’ASFC procèdent à des contrôles d’identité et à la prise de données biométriques.
La durée de leur séjour, sur place, varie en fonction de la disponibilité des autres logements, mais aussi de la complexité, le degré de détail, la disponibilité des renseignements et la recherche nécessaire, précise l’ASFC.
À l’heure actuelle, certains migrants peuvent rester jusqu’à trois jours dans ces roulottes.
Cette mesure va également faire encore grimper la facture fédérale. En 2017, Ottawa avait signé un contrat de 1,2 million de dollars pour la location de ces roulottes.
Le mois dernier, le gouvernement Trudeau avait indiqué à Radio-Canada que cette entente avait finalement grimpé à 7,2 millions. Avant cette décision d’ajouter de nouvelles installations qui alourdiront encore cette note.