ONFR+ 22 novembre 2022
Les demandes de permis d’études de la clientèle africaine continuent d’être massivement refusées par le fédéral dans les établissements postsecondaires de l’Ontario et de la francophonie canadienne. ONFR+ a contacté près d’une dizaine d’établissements de l’Ontario et du pays qui ont établi des taux oscillant entre 60 à 90 % pour la présente session universitaire.
La situation a donc bien peu changé depuis l’an dernier où des établissements disaient avoir des chiffres similaires. Pourtant, en février dernier, le ministre de l’’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté (IRCC) Sean Fraser soutenait avoir « pris des mesures pour résoudre ce problème » de taux de refus.
Ces hauts taux de refus sont marquants à l’Université de l’Ontario français (UOF) où seules 45 admissions à l’internationale ont été acceptées par le fédéral, sur un total de 365 demandes. Cela signifie que 88 % des offres n’ont pas été acceptées, mais l’UOF indique que certaines pourront être redirigées à la session d’hiver de 2023. Les 320 demandes d’admission non acceptées représentent plus à elles seules que l’effectif total de 284 étudiants de l’UOF.
À La Cité, on doit composer avec un taux de refus de 70 %, indique Pascale Montminy, la directrice des communications du plus grand collège francophone de la province. Cela nécessite pour le collège de faire de « 15 à 20 offres aux candidats pour que dix étudiants acceptent notre offre et que trois d’entre eux obtiennent un permis d’études ».
Dans le Nord de l’Ontario, le Collège Boréal affirme ne pas avoir de taux de refus « car les étudiants peuvent ne pas s’inscrire chez nous pour plusieurs raisons, et ils ne les partagent pas toujours avec nous ». Mais plus de 400 demandes offertes n’ont pas reçu de réponses en provenance des pays francophones d’Afrique alors que l’établissement compte 400 étudiants internationaux, soit 26 % de sa clientèle.
À Hearst, où près de 100 % de la population étudiante internationale provient d’Afrique, on précise avoir une cohorte de 83 étudiants internationaux sur un total de 207 demandes de permis d’études confirmés, ce qui correspondrait à un taux d’acceptation de 40 %. L’université dit toutefois avoir présenté des offres d’admission à 429 personnes au total. Son recteur, Luc Bussières, affirme toutefois qu’il est impossible de savoir si ces 429 personnes ont présenté une demande de permis d’étude de leur côté, ce qui abaisserait alors le taux d’acceptation à 20 %.
L’Université d’Ottawa et La Laurentienne ont indiqué à ONFR+ qu’elles attendaient de leur côté qu’IRCC leur fournisse des données concernant leurs propres taux de refus. L’an dernier, La Laurentienne disait avoir vu 85 % des demandes être refusées au cours des deux dernières années.
PAS JUSTE EN ONTARIO
Le problème n’est pas particulier à l’Ontario. Au Québec, plusieurs universités et collèges ont fait état de taux de refus élevés dans les derniers mois. C’est aussi le cas au Nouveau-Brunswick à l’Université de Moncton. La plus grande université francophone hors Québec au pays avance avoir eu, selon ses plus récentes données de 2021, un taux d’acceptation de 25 %. Sur les 1 600 offres d’admission présentées par l’établissement, 1 200 ont été refusées ou n’ont pas obtenu de réponse.
Au Manitoba, à l’Université Saint-Boniface, un peu plus de 60 inscriptions proviennent de l’internationale sur un total de 315 demandes présentées, soit un taux de conversion de plus ou moins 20 %. Ce sont près de 250 étudiants internationaux qui n’ont soit pas reçu de réponse de la part d’IRCC, soit été refusés, soit que l’étudiant n’a pas entrepris les démarches pour obtenir un permis d’étude.
ÇA VA CHANGER, DIT TRUDEAU
Le sujet est revenu au Sommet de la Francophonie à Djerba avec les nations africaines qui ont appelé le Canada à s’ouvrir davantage aux étudiants africains, rapportait Radio-Canada dimanche. Appelé à réagir, Justin Trudeau a affirmé que son gouvernement allait corriger la situation qu’il qualifie de désolante.
« J’ai demandé directement au ministre Fraser, de l’Immigration, de se pencher sur cet enjeu-là. On a besoin de plus d’étudiants francophones. On a besoin de plus d’immigrants francophones au Canada et on va faire tout ce qu’on peut pour régler ces défis et accélérer et améliorer les processus pour recevoir des étudiants de l’Afrique francophone. »
IRCC, via le ministre Sean Fraser, avait reconnu la présence de racisme au sein de son organisation dans un message discrètement publié en septembre en réponse à un rapport d’un comité parlementaire.
« On souhaite que ce système-là soit revu (…) parce que les demandes de l’Afrique ont beaucoup moins de chances d’être accordées que les demandes en provenance d’ailleurs », espère le recteur de l’UOF Pierre Ouellette.